Après une répétition l’après-midi dans la salle décorée de pivoines, les couverts mis, le concert a été une chevauchée où il enchaînait les airs sans laisser aux applaudissements le temps de s’éteindre, dans ce programme où il a fait cadeau au public de morceaux que l’on n’entend jamais.
L’un des joyaux de la soirée : « Una furtiva lacrima » . Mais pas l’aria qu’il a chanté tant de fois, l’air retravaillé par Donizetti, des années plus tard, une découverte pour le public qui reconnaît sans reconnaître et s’abandonne à cette beauté à la fois familière et nouvelle. S’abandonne, façon de parler car, lui, comme un cavalier en plein exercice de haute voltige saute du dos d’un cheval emballé à un autre, lance sa voix dans l’air suivant , soulève une nouvelle tempête de mots, de notes, de sensations, d’émotions dans le ruissellement d’une cette voix qui resplendit sans perde haleine.
C’est l’auditeur qui a le souffle coupé, pas lui. Lui, deux mots à sa pianiste, Morgane Fauchois-Prado qui soutient le rythme avec un bel enthousiasme, et il se lance dans l’air suivant.
De tout le concert, impossible de changer d’appareil (le second était pourtant dégainé, prêt à l’emploi) entre deux airs ni même de se caler le bras sur un dossier.
C’était au pavillon Gabriel, le Gala Pasteur-Wiezmann, donné au profit de la recherche scientifique, le 1° juin 2022.
En face, l’ambassade britannique fêtait le jubilé de la reine Elisabeth II et on a entendu tirer un feu d’artifice tandis que, dans la salle, Alagna révélait les joyaux d’un programme de haut vol.
©Jacqueline Dauxois