« Ma Louise », roman d’Édouard Moradpour, sélectionné pour le Renaudot

L’amour de Louise et Arnaud, d’Arnaud et de Louise est un hymne au Quartier latin, sur lequel on croyait pourtant que tout avait été dit, et un hymne à la vie. Dans la première partie, la plus longue du livre, les comparaisons se bousculent, d’un  style différent de celles de la suite, toutes ou presque introduites par « comme ». Mais il y a de savoureuses exceptions, comme : « son corps avait la peau mate d’un bec de toucan ». Or, à ce moment, elle est entièrement habillée, le lecteur ne se demande pas comment Arnaud connaît la couleur du corps de Louise tant ce qui est réalité pour le médecin devient réalité pour le lecteur. C’est la grande réussite de ce livre d’Edouard Moradpour, écrit à petits coups de pinceaux égaux comme les touches d’un tableau pointilliste qui, de près, montre des détails mais pour voir l’ensemble il faut reculer, c ‘est-à-dire ici lire jusqu’au bout. Pour le moment Arnaud sait  la peau du corps de Louise a la matité d’un bec de toucan, il le sait, c’est tout, l’insolite de la comparaison crée l’évidence, la vision originale de l’auteur revisite une rencontre, un amour, un quartier aimé, avec un flot inlassable de comparaisons qui surgissent au fil de l’imagination à travers une accumulations de détails, de souvenirs, passés et récents, récents comme ces pommes que croque Louise, passés comme ces évocations littéraires avec  Anais Nin, ou cinématographies avec l’évocation du célèbre, oui monsieur, de Doinel à Delphine Seyrig.

Et la bluette se fait tragédie


L’inquiétude commence lorsqu’ils s’éloignent du Quartier pour devenir amants, à l’abri des regards qui pourraient reconnaître Arnaud qui tient à sa réputation, pour le moment. Le lecteur, qui continue de se promener dans cette histoire d’amour de démon de midi assez classique, se demande où l’auteur le conduit jusqu’au moment où les amants en sont à la première fois et que cette comparaison vient aux lèvres de Louise :

« Nous sommes nus sous les draps comme à la morgue ». C’est avec une de ces comparaisons qui jusqu’ ici abondent dans le roman, que l’auteur indique la première bifurcation.

La seconde ne tarde pas et Arnaud se propose « d’ensevelir Louise de soins » après son suicide manqué. Alors seulement, on comprend pourquoi la seule chose à laquelle on n’a pas cru dans la première partie, c’était la lettre de Louise à Arnaud déclarant son amour, c’est que la lettre était fausse. On ne dira pas ici pourquoi, ce serait tuer le livre que de révéler les retournements successifs de la fin.

Il suffit de savoir que la ruse de Louise se double de la construction glaçante avec laquelle l’auteur conduit son projet jusqu’à l’inéluctable  avec la subtilité d’une mécanisme impitoyable.

Publié aux éditions Michel de Maule, le roman d’Edouard Moradpour, d’une belle écriture élégante, d’une construction aux rebondissements multiples a été sélectionné par le jury du Renaudot.

© Jacqueline Dauxois

Une réflexion sur “« Ma Louise », roman d’Édouard Moradpour, sélectionné pour le Renaudot

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