Renaud Capuçon et Kit Armstrong célèbrent l’anniversaire de Beethoven au festival de Musique de Menton

LA MAGIE INTACTE RETROUVÉE

La nuit tombe.
Le parvis se remplit, c’est-à-dire pas tout à fait. Comme la nef de la basilique pour le concert de Bertrand Chamayou, les distances sanitaires respectées, des sièges restent vides.
Les tribunes amovibles ont disparu devant l’église des Pénitents, et, en face, les sièges ajoutés, qui rognent la vue sur la mer et l’Italie, ont disparu aussi.
Rendu à la magie de ses commencements, le Parvis, dont les façades baroques scandent l’espace, retrouve ce charme et ce mystère incomparables qui séduisirent la princesse Grace de Monaco.

Dans les mains de Renaud Capuçon, le violon qui appartint
à Isaac Stern.

Dans cet espace, dont rien n’altère plus le fragile équilibre, où les sonorités sont plus précises, plus soyeuses et chaleureuses, le spectateur ne vient que pour la musique, produit vital, de première nécessité. Il n’y a plus d’entracte, personne ne s’en plaint. Finira-t-on, oubliant les tragédies qu’elle entraîne, par dire, merci covid?

Ce soir du 5 août 2020, sur le Parvis rendu à sa magie première, un public fervent attend deux artistes incomparables.

Renaud Capuçon et Kit Armstrong descendent l’escalier et montent sur la scène au milieu des acclamations.

Renaud Capuçon et Kit Armstrong, le 5 août 2020.

TROIS SONATES DE BEETHOVEN


Le violoniste blond au yeux bleus, le pianiste brun aux yeux noirs, l’un dans la force de l’âge, l’autre dans la jeunesse, tous les deux liés par la musique dans une si profonde et complice harmonie que l’impétuosité juvénile jaillit du violon autant que la maturité de la pensée – et la maturité éclate au piano avec la jeunesse. L’univers de Beethoven déploie ses richesses, atteint les profondeurs les plus sensibles de l’être, après avoir touché tout ce qui peut émouvoir l’intelligence et l’esprit captivés. L’interprétation se fait tour à tour déchirante de tendresse et impétueuse d’une passion d’abord contenue, puis révoltée, exaltée, déchaînée donnant, jusque dans l’impuissance à se dire, les accents profonds de la puissance beethovénienne.

CAPUÇON LE GRAND

Renaud Capuçon, le 5 août 2020.

La sensibilité, l’intelligence et la profondeur du jeu de Renaud Capuçon font qu’il est avec son Stradivarius comme un centaure et on se demande comment il peut se détacher de son violon – qui fut celui d’Isaac Stern. D’ailleurs, il s’en détache aussi peu que possible, les yeux toujours sur son étui, posé près de lui, quand il n’est pas sur scène penché sur lui.

Il joue. Il incarne. Son visage change, fragile et aigu, il devient puissant, traversé de douceur, de tristesse, de passion et de déchirements, comme un galet roulé par la respiration de la la mer, calme ou tempétueuse, emporté par des mouvements mathématiques et poétiques, inlassables, sensuellement construits. Plongé au cœur de la poésie d’une interprétation à ce point magistrale, il arrive que le violoniste ressemble à Beethoven – à qui il ne ressemble pas. C’est l’incroyable osmose. Sous l’archet, le violon, transcende l’interprétation qui devient création. C’est le moment parfait où l’expression d’une vérité s’exprime à travers la beauté.

Le piano de Kit Armstrong, jubile avec le violon magique et, avec lui, irradie de bonheur, y compris dans les larmes et l’angoisse d’un Beethoven déchiré.

Les soirées de l’année Covid, à Menton, vont rester dans les mémoires par la qualité d’un public redevenu ardent à aimer des interprètes inoubliables qui n’ont pas renoncé à lui apporter leur génie.

© Jacqueline Dauxois

Programme Ludwig van Beethoven 

Sonate n°8 en Sol Majeur, opus30, n°3.
Allegro assai – Tempo di minuetto, ma molto moderato et grazioso – Allegro vivace.

Sonate n°5 : « Le Printemps » en Fa majeur, opus 24.
Allegro – Adagio molto expressivo – Scherzo. Allegro molto – Rondo. Allegro ma non troppo.

Sonate n°7 en do mineur, opus 30 N°2.
Allegro conbrio-Adagio cantabile- Scherzo allegro- Allegro.

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