De Jupiter à Wagner, les métamorphoses du cygne

LÉDA ET LE CYGNE

Elle est païenne et vieille de quelques millénaires, la première image d’un cygne qui a marqué l’imaginaire collectif. C’est celle du Zeus grec, devenu le Jupiter romain, mari volage qui séduisait des vierges par des tours de magie. Il n’avait pas de préjugés et à l’occasion, changé en aigle géant, il enleva aussi un berger adolescent, Ganymède. Mais sa préférence allait aux tendres jeunes filles qu’il violait utilisant des métamorphoses inaccessibles au plus retors des sorciers. Trois d’entre elles ont inspiré des peintres parmi les plus grands,- ce qui a perpétué leur souvenir à travers les siècles.
Jupiter enleva d’abord la nymphe Europe. Ayant pris l’apparence d’un taureau doux et docile, il l’emporta à travers les mers et l’engrossa de celui qui devint le roi Minos. Commémorant cette agression, le platane, depuis, en oublie de perdre sa ramure.
La deuxième, Danaé, princesse d’Argos, gisait au fond d’une prison où l’avait enfermée son père à la suite d’une de ces prédictions dont se délecta l’Antiquité annonçant que le fils de sa fille le supplanterait sur le trône. Pour approcher l’inapprochable, Jupiter se changea en pluie d’or. Persée naquit de cet accouplement plus fantastique encore que le précédent.

Rubens, Léda et le cygne.


Enfin, ce fut Léda, fille d’un roi de l’Étolie que le dieu des dieux païens approcha changé en cygne. On ignore si Danaé accoucha d’une bourse géante qui contenait Persée, mais on sait que Léda pondit un œuf d’où sortirent les jumeaux Castor et Pollux.

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Les Mario de Roberto Alagna dans la légende de « Tosca »

Roberto Alagna en Mario, Metropolitan Opera, 2013.

22 août 2020

MARIO

Combien de fois il l’a chanté, il ne le sait pas, mais depuis le début de sa carrière, Roberto Alagna a été Mario dans plusieurs mises en scènes exceptionnelles. On peut citer :
En 2000, un film, sous la direction de Benoît Jacquot, avec Angela Gheorghui.
À Orange, en 2010, avec Catherine Naglestad, soprano américaine, la mise en scène était signée Nadine Duffaut.
Alors qu’on attend son prochain Mario à l’Opéra de Paris, en mai 2021, avec Aleksandra Kurzak, pour sa prise de rôle de Tosca, le Met, à sa vingt-troisième semaine de retransmissions, a diffusé, le 17 août 2020, le spectacle enregistré le 9 novembre 2013. 

De tous les Mario légendaires de Roberto Alagna, il y en a un qui compte en particulier pour moi, celui du ROH, celui qui a décidé de mon livre, celui que je raconte au chapitre 2 de la saison I de mes « Quatre Saisons avec Roberto Alagna », celui-là, l’Unique entre tous les uniques dont il me semble parfois que je ne sais plus rien :

« L’être irréel, qui vient saluer entre les plis immenses, n’est que sueur, pâleur et tremblements, jambes brisées, lèvres exsangues, bouche desséchée, halètements, blessure. Il s’incline profondément, comme pour toucher ses bottes de son front. Ses cheveux basculés lui cachent le visage… »

Chorégies d’Orange 2020, une « nuit magique » à la gloire de Roberto Alagna

Concert Covid aux Chorégies d’Orange, « nuit magique ».
Spectacle diffusé le 1° août 2020 par la 5.

« L’art ne s’arrête pas, on ne peut pas arrêter la musique. »
Roberto Alagna.

LUI : LES LARMES DES ÉCRANS

La « nuit magique » des Chorégies d’Orange, version Codid-19 de l’an 2020 a été conçue à la gloire de Roberto Alagna. On y voit, intégré au montage final, en plus des airs enregistrés pour la retransmission du 1° août, une projection de son Recitar (extrait de l’opéra complet Pagliacci donné avec Cavaleria Rusticana) et O souverain, extrait d’un concert, car il n’a pas chanté Le Cid en entier à Orange.
Le spectacle, à l’intérieur duquel il a construit le sien, avec Aleksandra Kurzak, a été enregistré dans un hémicycle désert. En deux arias et un duos, il illustre ce qu’il a dit un moment plus tôt :
«  L’art ne s’arrête pas, on ne peut pas arrêter la musique ».

« Manon Lescaut »avec Roberto Alagna et Kristine Opolais, l’unique feu d’artifice du 14 juillet covid 2020

Les retransmissionsCovid du Metropolitan
14 juillet 2020

AVANT DE COMMENCER

Alors, ça continue, les stades rouvrent, les raves parties sauvages, on peut s’y entasser de toute la France, pendant des jours et des nuits d’affilé, sur les plages, les gigots coutumiers rôtissent au cuisse à cuisse , cafés et restaurants sont entassés à boire et se goberger, comme si Pompéi leur tremblait sous les pieds, il y a des concerts publics, même classiques, mais les festivals, quand ils n’ont pas annulé, jouent à huis clos, le courageux petit Favart a rouvert, louant une place sur deux et exigeant le masque, mon Dieu, trois heures d’Opéra avec un masque sur le nez, je ne tiendrai jamais, j’aurais l’impression de ne pas entendre, ça bouge un peu côté musique, bouche à bouche aux grands noyés ; mais lui, le plus grand ténor, quand on le reverra, on n’en sait rien ; sa Carmen au Stade de France reportée aux calendes, son premier Lohengrin cet hiver à Berlin, on n’en sait rien. Il est vrai qu’il faut le protéger. Si le public se masque ; lui, qu’est ce qu’il va faire ? Duos d’amour à distance sanitaire ? Tout le monde crâne et tout le monde vit un cauchemar.

Retransmission, le 24 juin 2020, du « Samson et Dalila » de Roberto Alagna et Elīna Garanča, enregistrés le 20 octobre 2018

Les retransmissionsCovid du Metropolitan

Le 24 juin 2020.

En juin 2020, Orange aurait dû préparer le troisième Samson de Roberto Alagna pour le 10 juillet. Sans Elīna Garanča, mais mis en scène par Jean-Louis Grinda, ce qui permettait d’espérer le meilleur. À cause du covid-19, le spectacle est reporté à l’année prochaine. Le 24 juin 2020, le Met a retransmis le spectacle enregistré le 20 octobre 2018.

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Quand Andrea Chenier soufflait les bougies d’Alagna, 7 juin 2019 -7 juin 2020

7 JUIN 2019 – 7 JUIN 2020

C’était il y a un an, le 7 juin 2019, Andrea Chénier soufflait les bougies d’anniversaire de Roberto Alagna, cela semble à des années lumières.
Aujourd’hui, comme tous ceux qui ont été happés par un art qui est devenu leur raison de vivre, le ténor se retrouve pire qu’enchaîné, bâillonné.

En scène.


Depuis trois mois on ne l’a pas vu, pas entendu. Il y a eu de petites distractions musicales, si ce n’est pas tout à fait rien, ce n’est pas grand chose. Mais l’art, dans sa grandeur, sa vérité et son mystère, l’art qu’on a vu culminer, il y a un an, avec Andrea Chenier, on ne l’a plus. Le manque est dramatique car nous sommes gavés de reproductions, mais c’est de l’art vivant que nous sommes privés, alors que l’année dernière, le 7 juin exactement…

C’était à Londres.
Le soir de son anniversaire, il a bouleversé l’interprétation traditionnelle et son Chénier transfiguré s’incarnait enfin tel que ne pouvait pas ne pas être le plus grand poète français de son temps, arbitrairement jeté en prison et guillotiné. Alagna a donné au chant du poète, dans sa dénonciation des crimes aveugles, sa passion d’amour, son défi à la mort, la force et la douceur qui sont sa marque. Qu’il ait connu par cœur la vie et l’œuvre de Chénier ou qu’il ait recrée le personnage de l’intérieur, il l’avait comme toujours abordé non pas en interprète mais en créateur pour en faire un flambeau de vérité.

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Innocence et perversité dans le duo d’amour de Madama Butterfly

Le 6 mai 2020, le Met a doublé les séances de rediffusion en donnant Madama Butterfly (enregistré le 2 avril 2016) avec Roberto Alagna et Kristine Opolais (sa partenaire aussi dans Manon Lescaut). Destiné aux étudiants, aux professeurs et aux parents, le spectacle était précédé d’un entretien À la Maison avec Roberto Alagna, qui a répondu à des questions d’élèves. Ils ont eu de la chance, les petits Américains, de voir ce Pinkerton inégalable et d’entendre le ténor lui-même leur en parler (à retrouver sur YouTube).

C’est une illusion, mais c’est une illusion qui est véritable.
Roberto Alagna

Deux civilisations

Tout sépare Cio-Cio San, la petite Japonaise, orpheline de quinze ans, et Pinkerton, jeune officier de la marine américaine. Un entremetteur les réunit. Il leur organise un mariage à la japonaise, qui inquiète Sharpless, le consul américain, car ce qui est un jeu amoureux pour Pinkerton, représente le salut pour Cio-Cio San, dont le père a été contraint de se faire hara-kiri.

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Avec Roberto Alagna, entretien dans la salle de bains ou les coulisses du concert À la Maison

Roberto Alagna, il vous fait des surprises. Le concert At-Home était très intrigant. Quand et comment a-t-il été organisé ? Comment a-t-il choisi le duo ? Est-ce qu’avec Aleksandra Kurzak, ils ont hésité avec un autre ? Comment ont-il fait un tel spectacle dans leur maison?

Ci-dessus : L’Elisir d’Amore, à l’Opéra de Paris.

Ils font leur entrée à l’écran, les deuxièmes, après un Don Giovanni accompagné à l’accordéon et, là, entre trois murs, le quatrième occupé par l’ordinateur posé sur une échelle, ils ont chanté, joué, bougé, utilisant quatre accessoires, créant une véritable mise en scène de poche autour de la Barbara.

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CARMEN à la folie, retransmission 2020

CARMEN À LA FOLIE

Le 16 mars 2020, le Metropolitan a démarré sa série de retransmissions gratuites de l’un des opéras les plus célèbres au monde dans une interprétation légendaire de Roberto Alagna et Elīna Garanča, époustouflants dans la mise en scène de sir Richard Eyre, enregistrée le 16 janvier 2010.
Selon le rite du Met, qui change sa rediffusion chaque jour, cette Carmen a été visible pendant 20 heures d’affilée.

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Première planétaire : « Concert À la Maison  » et « Elisir d’Amore »

PLUIE D’ÉTOILES DANS UN MONDE CONFINÉ

Le 25 avril 2020, le Met organise un Gala « À la Maison » (1).
Pour un spectacle comme on n’en a jamais vu, dans une situation que le monde n’avait jamais connue, Roberto Alagna et Aleksandra Kurzak ont choisi de donner une coupe de l’Elisir d’Amore et ce n’est pas du bordeaux mais du champagne.

Il va pleuvoir des étoiles toute la nuit.
Quarante chanteurs, que personne n’aurait jamais pu rassembler sur une scène, chacun cloitré dans sa maison, donnent un concert à toute la terre ! Comme c’est sans prix, le Met l’offre pour rien.

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